Le contrat de travail du salarié et les éléments qui y sont mentionnés ne sont pas figés dans le temps. Il peut, en raison d’une pluralité de facteur, être amené à évoluer : par exemple en fonction de l’activité, des technologies, des besoins de l’entreprise, des compétences du salarié. Le contrat de travail du salarié et les conditions d’exercice de son activité professionnelle sont donc amenés à évoluer, à la demande du salarié, mais plus généralement, à l’initiative de son employeur.

En effet, l’employeur est doté d’un pouvoir de direction qu’il exerce tant sur les décisions collectives prises dans l’intérêt de l’entreprise que sur chacun des salariés pris individuellement.

L’existence d’un contrat de travail place donc, par lui-même, le salarié dans un lien de subordination juridique à l’égard de son employeur qui est, sous certaine réserve comme on le verra, libre d’imposer certaines modifications au salarié dans l’exercice de ses missions professionnelles et les circonstances dans lesquelles celles-ci s’exécutent.

Le pouvoir de direction de l’employeur n’est pas sans limites.

L’étendue et les limites des prérogatives de l’employeur dans l’exercice de son pouvoir de direction ne font pas l’objet de dispositions législatives générales. Elles résultent, pour l’essentiel, de la jurisprudence et quelques dispositions légales particulières.

La question essentielle ici est donc de savoir quels sont les éléments qui relèvent du pouvoir de direction de l’employeur et qui peuvent être unilatéralement modifiés par lui et les éléments qui sont soumis à l’aval du salarié.

Initialement, afin de déterminer si un employeur pouvait, ou non, imposer unilatéralement un changement d’horaire, de durée de travail, de lieu d’exécution de prestation, de tâches à accomplir ou de rémunération, la jurisprudence distinguait entre :

  • Les modifications substantielles et les modifications non substantielles du contrat de travail.

Les premières ne pouvaient être imposées par l’employeur et nécessitaient donc, pour leur mise en œuvre, l’accord du salarié.

Les modifications non substantielles, c’est-à-dire mineures, pouvaient au contraire être imposées par l’employeur et le refus du salarié d’exécuter le contrat ainsi modestement retouché constituait une faute justifiant une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’à son licenciement.

L’appartenance d’une modification litigieuse à l’une ou l’autre de ces deux catégories était donc une affaire d’appréciation :  tout dépendait de l’incidence du changement sur les conditions de vie et de travail du salarié.Autrement dit, pour déterminer si une modification relevait du pouvoir de direction de l’employeur ou devait être soumise à l’aval du salarié, le juge devait déterminer l’ampleur de ladite modification sur la situation professionnelle et personnelle du salarié.

Cette appréciation au cas, par cas/ in concreto, a pu paraître trop incertaine, notamment parce qu’elle permettait à l’employeur de remettre en cause le principe de la force obligatoire des contrats en modifiant toute partie du contrat de travail sans l’accord du salarié pour autant que la modification ne soit pas substantielle.

Par plusieurs arrêts du 10 juillet 1996, dont le célèbre arrêt Le Berre (Soc., 19 juillet 1996, n° 93-41.137), la Cour de cassation a abandonné son ancienne terminologie et consacré une nouvelle distinction entre :

  • D’une part la modification du contrat de travail qui suppose le commun accord des parties et,
  • D’autre part, la modification des conditions de travail du salarié qui relèvent quant à elle du pouvoir de direction de l’employeur.

Désormais, la première question juridique à régler est la délimitation de ce qui relève de l’accord des parties et de ce qui relève du pouvoir unilatéral de l’employeur.

Avant on se fondait sur l’importance de la modification (l’employeur pouvait toucher à tout sans l’aval du salarié à partir du moment où la modification était subtile).

Désormais, on se fonde sur la nature du changement et non plus son importance.

Selon que l’on se situe d’un côté ou de l’autre de cette frontière, le régime juridique applicable est radicalement différent :

  • Toute modification du contrat de travail, aussi modeste soit-elle ne peut intervenir qu’avec l’accord des deux parties.
  • S’il s’agit en revanche d’une modification dans les conditions de travail du salarié, l’employeur pourra décider seul, car cela relève de son pouvoir de direction.

C’est la jurisprudence qui a, peu à peu, tracé les contours du contenu du contrat de travail.

La modification du contrat de travail concerne :

  • Tout élément du contrat de travail que les parties ont, par une clause claire et précise entendue comme élément déterminant et non seulement comme une simple mention informative et/ou,
  • Tout élément jugé, par nature contractuel, c’est-à-dire, selon la jurisprudence, les éléments portant sur

-La qualification

-La durée de travail

-Le lieu de travail

-La rémunération

Tout autre élément relève des conditions de travail et peut être modifié unilatéralement par l’employeur dans une certaine mesure toutefois comme nous le verrons dans un prochain article.